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Publié le 02/02/2021
Label : Ursulinen nominé pour le Prix Mies van der Rohe 2022
Another Brick in The Wall
De hauts volumes de briques se devinent, à peine quittée la Brusselsepoort. Au travers d’une impasse qui rejoint l’intérieur d’îlot, entre les textures mêlées d’annexes et vérandas ordinaires des maisons voisines: des murs rouges, joints bavants. Au loin, les clochers. Malines est une ville d’églises et d’écoles. Les églises se dressent haut et les écoles creusent de larges cours. Le complexe scolaire des Ursulines est construit d’une de ces séquences de pleins et de vides. L’extension de l’école s’inscrit dans un processus itératif d’ajouts et de transformations d’édifices bâtis. Tout supplément demande pourtant de ménager avec justesse et précaution les vides qui organisent cette petite ville dans la ville.
Le projet de Label architecture ajoute sobrement deux volumes compacts et judicieusement ajustés au sein du complexe scolaire. Un premier volume au centre, hiérarchise les cours secondaires et primaires et connecte une aile ancienne. Un second volume plus bas, entre les mitoyens est de l’îlot, recrée une cour plus intime et abritée pour les maternelles. Dans chacun des cas, le plan compact maintient avec peu de moyens une qualité générale dans la distribution des différentes parties du programme. Deux belles grandes salles de sports ont calibrés leurs gabarits. L’une s’enterre sous le sol, l’autre flotte au-dessus des classes, comme pour enfouir ou dissoudre ces mètres cubes qui auraient compromis l’équilibre de l’ensemble. Aux Ursulines, on joue au foot avec la cathédrale pour goal.
Si les volumes empruntent le matériau de la brique au vocabulaire de l’architecture scolaire, leurs allures artisanales, gabarits droits, rythmes réguliers, brouillent la généalogie de cet îlot et semblent hérité d’un âge révolu. Amusant quand on sait que le programme porté par le ministère de l’éducation flamand s’appelle «école de demain». Via des procédures qui associe dès l’avant-projet architectes et entreprise de construction, il se conduit selon une métrique très contrôlée. Les matériaux mis en œuvre sont donc modestes et sobrement accordés. Ils confèrent une sorte de fausse banalité aux atmosphères intérieures. Mais chaque fois, les éléments d’architecture et les espaces ont été dessinés avec une générosité qui dépasse le pragmatisme des revêtements. Un couloir très large, des impostes toutes vitrées, des circulations verticales en éclairage direct et finalement, des fenêtres de très grandes dimensions. A cela s’ajoute un ensemble de petits édicules, barrières, rampes, escaliers, porches et préaux. Des pivots et des filtres qui rendent confortables les parcours et les séjours des centaines d’élèves et enseignants d’une cour à l’autre, de la maison à la classe, du vélo au banc d’école. Ils se collent aux voisins, mêlant leur briques à l’ancien avec amusement.En façade, on retrouve les grandes baies dans une trame borgne qui mimique à l’envie les empreintes rejointoyées de fenêtres jamais ouvertes. Ce sont ces fenêtres qui apportent le caractère institutionnel des deux édifices et les marquent du sceau de la même intervention, comme pour tout de même les discerner des actions précédentes. Une architecture resserrée à l’expression de ses murs qui porte avec peu le souffle d’un travail espiègle, se jouant du contexte et des contraintes pour produire par-delà la forme un ensemble bien composé.
Guillaume Vanneste, ingénieur architecte, enseignant et chercheur à la faculté d’architecture, ingénierie architecturale et urbanisme de l’Université Catholique de Louvain (LOCI-UCLouvain). Fondateur et associé au sein du bureau vvv architecture urbanisme.