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Pascal Daspremont - H2A

Publié le 21/01/2015

Carte blanche : H2A - "L’expérience internationale d’un bureau wallon"

Centre de congrès de Mons
© Wallonie-Bruxelles Architectures

« La collaboration internationale est un exercice périlleux qui nécessite de mettre en place des moyens adaptés. Est-il possible de collaborer avec un grand nom de l’architecture ? Quelle place occuper dans le processus de création ?

En 1988, lorsque l’exposition consacrée aux architectes déconstructivistes a lieu au MOMA, j’entame mes études d’architecture. Des noms tels que Frank Gehry, Peter Eisenman, Zaha Hadid, Rem Koolhaas et... Daniel Libeskind vont seulement commencer à signifier quelque chose pour moi.

Alors que dix ans plus tard, j’entamais à peine ma carrière d’architecte, Daniel Libeskind terminait le Musée Juif à Berlin. J’étais touché par cette architecture, impressionné par autant de justesse, par la tension dramatique de ces lignes brisées,  par ces successions d’espaces oppressants, par cette omniprésence du vide qui impose sa puissance émotionnelle. Il s’agit là d’une Architecture porteuse de sens. Elle concrétise les moments les plus sombres de notre histoire et elle nous interpelle, sans jamais cesser de nous émouvoir. Il n’était pas concevable d’imaginer un jour collaborer avec celui qui venait de réaliser l’une des œuvres majeures de l’architecture du XXème siècle, même dans un futur très lointain.  

La carrière d’architecte est faite de rencontres et de hasards, d’opportunités qu’il faut pouvoir saisir. Il faut parfois faire preuve d’audace et oser se lancer lorsqu’une occasion se présente. Après la réalisation du Centre de Compétence en Environnement du Forem Initialis (Award de l’énergie 2005), un géant du net prend contact avec nous pour construire leur  premier Data Center en dehors des Etats-Unis. C’est un challenge que nous relevons et, durant cinq ans nous découvrons l’approche anglo-saxonne du projet d’architecture. Travailler avec des partenaires établis de l’autre côté de l’Atlantique permet, grâce au décalage horaire,  de disposer de journées de vingt-quatre heures. Mais pour y parvenir, il est primordial de mettre en place une communication efficace, de  structurer l’information pour que le travail effectué soit parfaitement compris par les différents intervenants. Des plateformes d’échange de documents sont mises en place afin que chacun puisse disposer des derniers plans et documents à jour. Un reporting est transmis chaque jour, des vidéoconférences hebdomadaires permettent de faire le point sur le projet et d’aborder des questions qui doivent être discutées. Le projet a duré cinq années, ce qui était au départ un challenge s’est avéré une très riche expérience. Nous avons franchi l’obstacle de la langue et mis en place un certain nombre d’outils qui ont complètement modifié notre manière d’appréhender un projet d’architecture.

C’est lors de la réalisation du Centre de Distribution Logistique de H&M que nous avons pu à nouveau mettre en pratique les méthodes acquises même si elles ont dû être adaptées à la philosophie de travail d’une entreprise suédoise. Fin 2010, CIT BLATON nous contacte et nous propose de participer à un concours d’architecture, avec un grand nom américain… Le mystère reste entier durant plusieurs jours. De qui s’agit-il ? Cette question nous hante. Rapidement, le rideau tombe et les choses se concrétisent, c’est une merveilleuse aventure  qui commence pour H2A.  L’objet du concours  est  la réalisation du futur Centre des Congrès de Mons,  nous allons y participer, en association avec le Studio Daniel Libeskind. Nous avons cependant quelques réserves, quel sera exactement notre rôle dans le projet? Allons-nous devoir jouer les « petites-mains » ?

Rapidement, les choses s’emballent. La générosité, l’énergie et l’enthousiasme de Daniel Libeskind se propagent au sein de l’équipe. Nos craintes se sont très vite apaisées. Tous et toutes ont le sentiment d’œuvrer à quelque chose d’important. Les semaines,  les mois défilent et notre  équipe belgo-américaine peut  pratiquement travailler en continu. Les nuits blanches se succèdent pourtant mais,  c’est un projet bien abouti que nous défendons devant le jury. La veille, la présentation a été mise au point avec Daniel Libeskind, jusque dans le détail : pour pouvoir convaincre, nous devons nous même l’être et le montrer. La magie opère, nous sommes lauréats. Moins d’un an plus tard, le chantier débute. Pour bâtir le rêve, il faudra encore innover et faire preuve d’ingéniosité. Tous vont s’y employer, entreprises et ouvriers, atteints eux aussi du même syndrome, s’investissent sans compter et concrétisent petit à petit les espaces imaginés. Il s’agit d’un chantier complexe et les surprises sont nombreuses, des demandes de modifications interviennent en cours d’exécution. Plus que jamais la communication est primordiale et peu importe les 6.000 km qui nous sépare, c’est une réelle équipe qui s’est constituée au fil du temps.

Aujourd’hui, après quatre années de travail acharné, le MICX (Mons International Congress Xperience) est sorti de terre. S’il s’agit pour nous, en tant qu’architectes, de la fin d’une belle aventure, c’est aussi et surtout une confirmation. L’extraordinaire expérience que constitue une collaboration internationale même si elle nécessite un total investissement et la mise en place de moyens adaptés, elle est source de développement, d’échanges et d’ouverture sur le monde. Lorsqu’elle se déroule bien, elle peut générer de l’architecture. »

Par Pascal DASPREMONT d'H2A
Le 20 janvier 2015


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